Aller directement au contenu

Troisième personnageAlain Bosquet

Troisième personnage au milieu du poème,

je ne suis ni l’écrit ni l’écrivain ; observateur qui se débat dans ce dilemme :

faut-il intervenir de droit divin,

ou subir en silence un assaut de mensonges, semblables quelquefois aux vérités ?

Je suis le fabuliste aux fables qui s’allongent ; il s’en détache, il veut les habiter.

C’est à lui-même enfin qu’elles se font nocives, comme corbeaux pris aux rets du miroir.

Je m’y redéfinis, ô souffrance excessive d’être au matin un autre que le soir.

À la matière accorde-t-on quelque distance,

ou n’est-ce pas détruire le tissu que de l’analyser ?
Le penseur qui se pense

a la pensée pénible, à son insu.

La chanson est ma chair et j’y siège en arbitre, sans jamais distinguer le bien du mal :

le sang chaque matin abreuve le chapitre et le poumon est un état verbal.

Un esclave du mot en devient le monarque.

Ce qui se conçoit bien veut s’éviter : en-moi, c’est la guerre civile et je remarque

que l’on m’y traite à peine en invité,

avec trop de façons.
Il faut que je me presse

pour distinguer victime et assassin ; fait de moi mais sans moi, mon poème en détresse

ne reconnaît en moi qu’un corps malsain.

Lectures : 0
Publié dansAlain BosquetPoètes

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *