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Plainte poétiqueGuillaume Colletet

Feraisje encor des vers ? Ami, j’en ai tant fait !
Plus j’enrichis ma langue, et moins je deviens riche,
Mon esprit abondant laisse ma terre en friche,
Et le vent de l’honneur n’emplit pas mon buffet.

Un poète accompli n’est plus qu’un fou parfait,
Dès qu’il prodigue un bien dont il doit être chiche ;
Ce n’est plus qu’une idole, et sans base et sans niche,
Qu’on flatte en apparence et qu’on berne en effet.

Je rougis de pâlir si longtemps sur un livre ;
De me tuer toujours pour vouloir toujours vivre,
D’affliger mon esprit pour divertir autrui ;

De posséder un nom dont le bruit m’importune,
De m’élever si haut, et n’avoir point d’appui,
D’être bien chez la muse, et mal chez la fortune.

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Publié dansGuillaume ColletetPoètes

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