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Les FontainesTheodore de Banville

Les fontaines, les fontaines

S’élancent en gerbes hautaines

Et, lumineuses, jaillissent

Et de leurs feux s’enorgueillissent.
Leur triomphe se décore

De ton fluide éclat d’aurore,

Embrasement qui nous berces,

Et montre des couleurs diverses.
Comme en des apothéoses

Elles montent, vertes et roses,

Ou bien refont leurs toilettes

Jaunes, lilas et violettes.
Avec leurs beautés récentes,

Les fontaines phosphorescentes,

Dont le doux éclat flamboie,

Emplissent nos yeux de leur joie.
Leurs adorables féeries,

S’éblouissant de pierreries,

Mêlent, pour charmer l’artiste,

Le rubis avec l’améthyste.
Que votre eau superbe et claire

Se précipite en sa colère,

Et croisez vos incertaines

Lueurs, ô fontaines, fontaines!
Les fontaines en délire,

Ainsi qu’une orageuse lyre

Dont la corde se courrouce,

Chantent dans la nuit pâle et douce.
Dans votre gloire ingénue,

Vous montez vers la blanche nue

Par des élans grandioses,

Fontaines qui roulez des roses!
Splendeurs que l’ombre importune,

En vos jets baisés par la lune,

Dont les blancs luisants ruissellent,

Mille diamants étincellent.
Divinement somptueuses,

Vous brillez, eaux voluptueuses,

Comme l’acier clair d’un glaive,

Et vous êtes des fleurs de rêve.
Car vos grands et purs calices

Ont plus de suaves délices,

Plus de tendresse et de flammes

Que les chers désirs de nos âmes.
O flots jaillissants, lumières,

Caresses de roses trémières,

Votre beau vol énergique

Est fait pour la forêt magique,
Et l’amazone Hippolyte

Blonde comme une chrysolithe,

Écouterait, près d’Athènes,

Les mélodieuses fontaines.
25 juin 1889.

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Publié dansPoètesTheodore de Banville

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