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San bernardinoJules Supervielle

Que j’enferme en ma mémoire,

Ma mémoire et mon amour,

Le parfum féminin des courbes colonies,

Cet enfant nu-fleuri dans la mantille noire

De sa mère passant sous la conque du jour,

Ces plantes à l’envi, et ces feuilles qui plient,

Ces vers mouvants, ces rouges frais,

Ces oiseaux inespérés,

Et ces houles d’harmonies,

J’en aurai besoin un jour.

J’aurai besoin de vous, souvenirs que je veux

Modelés dans le lisse honneur des ciels heureux,

Vous me visiterez, secourables audaces,

Azur vivace d’un espace

Où chaque arbre se hausse au dénouement des palmes

A la recherche de son âme,

Où la fleur mouille en l’infini

De la couleur et du parfum qu’elle a choisis,

Où je suis arrivé plein d’Europe et d’escales

Ayant toujours appareillé,

Et, sous le chuchotis de ces heures égales,
Du fard des jours errants je me suis dépouillé.

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Publié dansJules SuperviellePoètes

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