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BaignoireRoland Dubillard

La baignoire s’est endormie

Avant ce baigneur de minuit.

Lui, les yeux grands ouverts.

Il écoute, dans la lumière,

Un bruit qui ressemble à celui

Que ferait un nuage en visite,

La nuit, dans un couloir d’un magasin de meubles.

Et quand la vidange a fini d’effacer l’eau du bain,

Qu’elle reste la bouche ouverte et respire

Comme un visage d’ange,

Le baigneur nu, lentement, cesse d’entendre

Ce que n’entendent pas les dormeurs;

Il écoute maintenant quelque chose d’autre et de

lointain…
Est-ce encore un nuage qui parle ?
C’est une foule à peine distante qui murmure ;
Ou plutôt une voix étrangère dans cette foule,
Une voix qui ne sait pas parler ; mais lui
De toutes ses oreilles, nu dans son absence d’eau,
Par l’oreille du trop-plein
Il entend des mots d’amour
Qui s’adressent à lui seul
Depuis l’autre côté de la nuit;
Les mots qu’il sait bien qui sont les seuls vrais mots

d’amour et qu’il ne connaissait pas.

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Publié dansPoètesRoland Dubillard

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