Sonnet XXXI.
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
Ou comme celui-là qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d’usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son âge !
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village
Fumer la cheminée, et en quelle saison
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
Qui m’est une province, et beaucoup davantage ?
Plus me plaît le séjour qu’ont bâti mes aïeux,
Que des palais Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît l’ardoise fine :
Plus mon Loir gaulois, que le Tibre latin,
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin,
Et plus que l’air marin la douceur angevine.
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Dans le poème, Du Bellay parle du plaisir de revenir dans son village natal, préférant la simplicité et la familiarité aux richesses et splendeurs des grandes villes. Cela reflète sa propre vie : issu d’une famille de petite noblesse mais sans grande fortune, il a connu la vie à Paris et les ambitions de la Pléiade, mais il restait attaché à son Anjou natal.
Ainsi, son attachement à la maison familiale et aux paysages de son enfance n’est pas seulement poétique, c’est aussi une expression de son expérience personnelle : la richesse matérielle ne remplace pas le bonheur des souvenirs et de la simplicité de sa patrie.