Aller directement au contenu

La PluieTheodore de Banville

Ce temps-là ne m’a pas déplu

Et son rhythme obstiné me grise.

Mais, chers amis, comme il a plu!

Comme l’atmosphère était grise!
Lorsqu’elle tombe drue encor

Et que le soleil la traverse,

Alors la pluie est tout en or

Et sa longue chanson me berce.
Puis le rayon vermeil, avec

Fierté, s’enfuit comme une flèche. –

Selon le beau symbole grec,

Danaé, c’est la Terre sèche.
Sans qu’on lui reproche aucun tort,

Meurtrie et toute malheureuse,

Elle se tourmente et se tord,

Comme une personne amoureuse.
Elle cherche en vain le repos,

Car elle brûle. Mais la pluie

D’or, vient caresser à propos

Cette princesse qui s’ennuie.
Il fera bon pour l’Opéra,

Puisqu’à mars juillet s’assimile;

Dans les théâtres, on fera,

Comme au coeur de l’hiver, six mille.
Dans le mystérieux éther

Où sa fantaisie est diverse,

Du grand ciel d’en haut, Jupiter

A plu, j’ose le dire, à verse.
Il est venu dans cet air bleu

Qu’il inonde, orage ou rosée,

Et, tout de bon, la Terre en feu

Peut dire qu’elle est arrosée.
Qu’elle trouve une douce voix

La pâle victime qu’on tente!

Mais par exemple, cette fois,

Si Danaé n’est pas contente!…
14 juillet 1888.

Lectures : 0
Publié dansPoètesTheodore de Banville

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *