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Le PressoirTheodore de Banville

À Auguste Vitu
Sans doute elles vivaient, ces grappes mutilées

Qu’une aveugle machine a sans pitié foulées !

Ne souffraient-elles pas lorsque le dur pressoir

A déchiré leur chair du matin jusqu’au soir,

Et lorsque de leur sein, meurtri de flétrissures,

Leur pauvre âme a coulé par ces mille blessures ?

Les ceps luxuriants et le raisin vermeil

Des coteaux, ces beaux fruits que baisait le soleil,

Sur le sol à présent gisent, cadavre infâme

D’où se sont retirés le sourire et la flamme !

Sainte vigne, qu’importe ! à la clarté des cieux

Nous nous enivrerons de ton sang précieux !

Que le cœur du poète et la grappe qu’on souille

Ne soient plus qu’une triste et honteuse dépouille,

Qu’importe, si pour tous, au bruit d’un chant divin,

Ruisselle éblouissant le flot sacré du vin !
Mars 1842

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Publié dansPoètesTheodore de Banville

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