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Les Grands FétichesBlaise Cendrars

I
Une gangue de bois dur

Deux bras d’embryon

L’homme déchire son ventre

Et adore son membre dressé
II
Qui menaces-tu

Toi qui t’en vas

Poings sur les hanches

A peine d’aplomb

Juste hors de grossir?
III
Noeud de bois
Tête en forme de gland
Dur et réfractaire
Visage dépouillé
Jeune dieu insexué et cyniquement hilare
IV
L’envie t’a rongé

Je menton
La convoitise te pipe
Tu te dresses
Ce qui te manque du visage
Te rend géométrique
Arborescent
Adolescent
v
Voici l’homme et la femme
Également laids également nus
Lui moins gras qu’elle mais plus fort
Les mains sur le ventre et la bouche en tire-lire
VI
Elle
Le pain de son sexe qu’elle fait cuire trois fois par jour
Et la pleine outre du ventre
Tirent
Sur le cou et les épaules
VII
Je suis laid!
Dans ma solitude à force de renifler l’odeur des filles
Ma tête enfle et mon nez va bientôt tomber
VIII
J’ai voulu fuir les femmes du chef
J’ai eu la tête fracassée par la pierre du soleil
Dans le sable
Il ne reste plus que ma bouche
Ouverte comme le vagin de ma mère
Et qui crie
IX
Lui
Chauve
N’a qu’une bouche
Un membre qui descend aux genoux
Et les pieds coupés
x
Voici la femme que j’aime le plus
Deux rides aiguës autour d’une bouche en entonnoir
Un front bleu
Du blanc sur les tempes
Et le regard astiqué comme un cuivre
British

Muséum,

Londres, février 1916.

Blaise Cendrars

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Publié dansBlaise CendrarsPoètes

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